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tapanur
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Gilbert mène l'enquête (5) Empty Gilbert mène l'enquête (5)

Dim 30 Juin - 10:26
Mais pourtant, à quelques heures de l’échéance fatale, tout bascula.
Tau, qui scrutait les alentours, m’avertit de l’arrivée d’un véhicule dans le village. La chance allait peut-être rire à nouveau. Je vérifiai le bon fonctionnement du magnétophone et tendis l’oreille. Au bout de cinq bonnes minutes j’entendis enfin quelque chose :
- Bonjour mes amis !
Graël accueillait les nouveaux arrivants.
- Bien ! Où en sommes-nous ? reprit-il
Un type répondit :
- Pour la CIE, c’est réglé ! A présent, on doit s'occuper de la VEC, vous avez trouvé la personne en question ? 
- Oui ! Il s’appelle Robert Soulier, pas de famille connue, personne ne s’inquiétera de sa disparition ! Répondit Graël
- Vous êtes sûr qu’il fera l’affaire ? Demanda l’homme.
- Bien entendu, regardez la photo ! Même taille, même âge, même corpulence ! 
- Bien ! Quand pouvons-nous l’emmener ? 
- Immédiatement, vous le trouverez dans la buanderie ! Vous avez l’argent ? 
- Oui ! Tenez, vous pouvez compter ! 
- Pas le temps, je vous fais confiance ! Adjudant, accompagnez nos amis à la buanderie ! Messieurs, bonne route ! Conclut Graël.
Les choses commençaient à se clarifier. Graël venait de vendre le pauvre Robert Soulier à des inconnus. Quant à savoir pourquoi, c’était une autre paire de manches. Mais l’occasion d'en apprendre davantage était trop belle et puis, de toute façon, l’émetteur ne tiendrait plus bien longtemps. Je décidai donc de filer la bagnole des «visiteurs » qui devrait, tôt ou tard, quitter le village avec le pauvre Robert à son bord. Tau me rejoignit et monta dans la caisse. Evidemment je dus encore me dévouer pour pousser sa poubelle à roulettes. Au bout de cinquante mètres elle démarra enfin. Nous n’avions plus qu’à attendre notre proie.
Dix bonnes minutes passèrent et la bagnole déboucha devant nous. Tau roula en douceur pour rester à bonne distance. Nous parcourûmes ainsi quelques bornes mais soudain, les mecs accélérèrent.
- Merde, ils nous ont repérés ! Dis-je à mon copain.
- T’en fais pas, Yilbert, ye vais leur faire le coup du cherpent !
Tau appuya sur le champignon. Après deux mouchoirs trempés de sueur et, comme je m’attaquais aux housses du siège pour m’éponger, nous finîmes par rattraper les fuyards et les dépassâmes dans un virage. Je n’en menais pas large et mon ventre se tordait comme une tresse d’écolière. Tau tourna le volant d’un coup sec. Nos poursuivants, surpris par la man?uvre, tentèrent de nous contourner et finirent leur course dans le fossé.
Tau freina brusquement et nous finîmes par nous arrêter. Puis, il bondit de la bagnole, comme une bénédictine quittant un sex-shop, et courut vers les truands. Les deux types étaient dans les limbes. Je rejoignis la petite troupe et ouvris le coffre de leur bagnole. Le pauvre Robert Soulier gisait là-dedans, ficelé comme une paupiette.
Je l’aidai à s’extirper du coffre et nous regagnâmes tous trois la voiture de Tau. Avec Robert nous tenions là un élément essentiel. Il pourrait certainement nous en apprendre un peu plus sur cette étrange histoire. Nous retournâmes au dojo pour faire le point. Robert se remit lentement, à coups de f?tus de singe confits et de rouleaux de printemps multi vitaminés.
Je tentai de lui parler :
- Bonjour ! Je m’appelle Gilbert ! Et vous ? 
- Je suis Pietr Companov ! Répondit-il.
Le malheureux délirait. Je me dis que le choc lui avait certainement emmêlé les boyaux cérébraux.
- Mais non, vous êtes Robert Soulier, vous ne vous rappelez pas ? Ajoutai-je.
Mais il insista :
- Je m’appelle Pietr Companov et je suis directeur d’une usine de nougat ukrainien !
Ah...on n’en tirera rien ! Dis-je à Tau qui acquiesça en fermant lentement les paupières.
En effet, nous ne pourrions rien en tirer. Il fallait le montrer de toute urgence à un spécialiste des neurones en péril. J’avais, parmi mes nombreuses relations, un ami neuropsychiatre à l’hôpital Cochon, le Docteur Zéphirin. A l’époque il m’avait soigné pour une sévère dépression, à la suite d’un terrible accident. Certains s’attachent à un chien, un chat ou un mini-porc, moi, c’était Gaspard, mon hamster. Ah, Gaspard…tendre ami, compagnon de mes longues nuits de solitude. Mais attendez, je vous arrête tout de suite. Je vous entends déjà dire : « Ah, le Gilbert, il peut bien parler de Moustache et ses clébards, mais finalement il ne vaut guère mieux avec son rongeur ! »
Détrompez-vous ! Nous avions, Gaspard et moi, des rapports basés sur une amitié saine et virile, même si je dois confesser que je lui ouvrais, de temps en temps, le refuge de mes draps quand la foudre zébrait le ciel et que le tonnerre roulait ses boulets sur la plaine. Non, honnêtement, notre relation n’avait rien d’ambigu. Enfin bref, revenons plutôt au récit du drame:
Je promenais la pauvre bête en laisse, comme chaque jour. Il vivait, au village, un idiot notoire qui marchait du matin au soir, arpentant sans relâche toutes les venelles des environs. Nous l’avions surnommé Quasimondain. Ah c’est sûr, dans Notre Dame de Paris il aurait pu décrocher le rôle du bedeau sans passer de casting. On aurait dit une patate germée avec des jambes et son crâne était si gros qu’il eût fallu deux cous pour le soutenir. Pourtant, j’avais sympathisé avec lui, le croisant très souvent, au hasard de mes errements pédestres… jusqu’à ce terrible jour.
Quasimondain et moi patientions à un feu rouge, attendant sagement que le petit bonhomme daignât enfin passer au vert. Soudain il m’adressa la parole comme ça, sans prévenir.
- Humff ! Arggh ! Gilmert ! Marmonna t-il.
- Salut, Quasimondain, ça boume ? Répondis-je.
- Aaagnoumf ! Mouif , fa boume bien Milgert !
Le feu restait désespérément rouge et je commençais à piaffer. Je ne suis pas contre les échanges constructifs entre adultes consentants mais là, je ne savais plus quoi dire. Même Gaspard, d’un naturel pourtant ouvert, ne semblait pas emballé par la conversation. Il faut dire que le vocabulaire de Quasimondain n’était pas des plus étoffés et que sa philosophie sur la vie aurait pu tenir sur un papier de Carambar. Comme je le redoutais, Quasimondain, voyant en moi la promesse d’une belle amitié, prit une folle initiative.
S’approchant de mon compagnon à poils il tendit la main vers lui, pour le caresser. Gaspard, paniqué à l’approche de cette monstrueuse vison, prit ses pattes à son cou et vint se réfugier entre mes jambes. A mon tour, j’esquissai une parade, m’apprêtant à repousser l’envahisseur, tendant vers lui la petite croix qui pendait à mon cou, au bout de sa chaînette. Ce faisant, je déplaçai mon pied vers l’intérieur et entendis quelque chose craquer sous mon ranger. Ô Malheur, très grand malheur ! Je venais tout simplement d’écraser Gaspard, mon seul ami, mon unique raison de vivre. Il n’y a avait plus rien à faire. Levant ma godasse je constatai les dégâts. Le corps de Gaspard ressemblait à un blini aux tripes, façon mode de Caen. Seule la tête restait intacte et les yeux vitreux de mon compagnon en disaient long sur son moral du moment. Quasimondain, contemplant la scène, leva vers moi son regard de bovin apathique et crut bon de dire:
- Gnaspard, l’est mort Gnaspard, argnfff !
Là, c’était la goutte qui faisait déborder le bidet. Fou de rage je pris mon élan et balançai un coup de pompe dans les noisettes du bredin. Le choc fut si violent qu’il dût se faire opérer d’urgence, ses testicules étant resté coincés quelque part entre le sternum et les poumons. Mais après tout cette face de virus l’avait bien cherché. Et puis moi, la justice immanente je n’y crois pas plus qu'ça, alors mieux vaut s’en occuper soi-même.
Il me fallut deux ans d’analyse pour digérer cette histoire et, ce jour là, j'avais pris la décision de ne plus fréquenter de Q.I inférieurs à cent, rayant ainsi de mon agenda les trois quarts de mes relations. Enfin, cela m’avait permis de connaître Zéphirin.
Zéphirin était un homme placide, légèrement obèse. Lorsqu’il marchait, on aurait dit une pute en fin de carrière, il roulait ses grosses fesses de gauche à droite dans un effort émouvant. Pourtant il était très fort, dans son domaine et avait même reçu le prix du meilleur praticien à un congrès sur la "frustration des anachorètes grégaires".
Il était homosexuel et ne s’en cachait pas, se vantant même d’une cicatrice à l’abdomen, souvenir d’un coup de hachoir que je lui avais filé, alors qu’il tentait de m’initier à la caresse thérapeutique sur le bas ventre. A l'époque il vivait avec un rugbyman australien, goûtant ainsi aux joies du plaquage érogène et de la mêlée orgasmique.
Il habitait un manoir perdu dans les bois, à une dizaine de bornes de Grongeac. Pour plus de sûreté, je décidai quand même de lui passer un coup de bigo. Après trois minutes de conversation, il fut convenu que nous irions lui rendre une petite visite vers dix neuf heures. Je lui avais vaguement exposé le problème et il semblait tout excité à l’idée de relever ce défi.
Robert, lui, restait prostré dans son mutisme et avait même fini par fermer les yeux. Le pauvre type n’était pas au mieux de sa forme. Tau s’occupait de lui, voyant là une occasion inespérée d’initier un monde incrédule aux vertus extraordinaires de la médecine chinoise. Ainsi, posant ses deux index sur les tempes du malade, il tenta de lui transmettre son énergie positive. Après quelques minutes d’attouchements et, à mon grand étonnement, Robert ouvrit les yeux en souriant. Je m’approchai, intrigué.
- Ah ben ça alors, tu lui as fait quoi ? Demandai-je à Tau 
- Y’ai utiligé mon chi, Yilbert, le chi ch’est l’énergie vitale qui peut vaincre le dragon.
- Hé, bé… ! Répondis-je, telle Bernadette Soubirous devant un gorille en érection.
Je décidai alors de m’adresser à Robert:
- Coucou…vous m’entendez ?
Nous patientâmes quelques instants, suspendus à ses lèvres, transpirant d’anxiété. Et puis soudain, Robert ouvrit la bouche et nous dit :
- Je suis Pietr Companov, directeur d’une usine de nougat ukrainien ! 
- Vaincre le dragon, hein ! Assénai-je à Tau en faisant "non" de la tête.
Alors que je commençais à m’éloigner mon pote me concéda d’un air gêné :
- Bon, peut-être cherait-il plus sage de montrer Robert à ton ami médechin !
Je retournai vers Tau, saisis fermement ses épaules et lui répondis :
- Allez mon vieux, on peut pas gagner à tous les coups !
Il ébaucha un sourire entendu. A n’en pas douter il avait enfin compris que ses chinoiseries n’auraient même pas pu décoller une crotte de nez dans le pif d’un champion d’apnée. Là, nous n’avions plus le choix. Tau avait eu sa chance et Zéphirin était vraiment notre dernier recours. En cas d'échec avec le doc, on étaient bons pour le suicide collectif et la "Une" du journal, rubrique "Nécro".
Nous patientâmes donc quelques heures et décidâmes de quitter le dojo. Pour le coup, j’en profitai pour initier Robert au "pousser de voiture" et il s‘en tira plutôt bien, pour un débutant. Bref, nous partîmes tous trois chez Zéphirin, cette aventure me permettait de renouer avec d’anciennes connaissances et ce n’était pas pour me déplaire.
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